Du au
Vendredi 20 janvier, 14h et samedi 21 janvier, 16h
Auditorium Olivier Messiaen
4 €, 10 €, 5 €
Spectacle / Danse / Théâtre / Musique
Pigment.s
Texte et mise en scène : Mathilde FLAMENT-MOUFLARD, assistée de Jeanne FRERET
Chorégraphies : Adeline BERNARDO, Marie-Camille BOUVIER
Compositions : Niccolò ROMERO-PASSERIN
Avec Clara ANTOONS, Ludovic BERNARDO,
Marie-Camille BOUVIER, Kostia CERDA, Faísca,
Quentin FAURE, Paul FRAYSSE, Pierre LAMY,
Alexandra MORETTE, Niccolò ROMERO-PASSERIN
Pigment.s c’est le témoignage de dix jeunes, dix artistes sur scène : danseurs, circassiens, comédiens, musiciens. Ensemble, ils soulèveront la question du genre, de la parité, mais aussi de l’égalité entre les êtres humains. Pigment.s, c’est le condensé de leurs cheminements, de leurs interrogations, de leurs doutes et de leurs espoirs. C’est l’indignation et la colère qui grondent, c’est lever le poing pour refuser, c’est oser espérer et se battre à corps et à cœur perdu pour notre jeunesse qu’on refuse de voir s’envoler.
NOTE D'INTENTION
Au commencement était le sombre, l'infini
Ce sont les premiers mots du spectacle, fruit d’une écriture contemporaine où la danse et la musique se mêlent à la parole. Un spectacle qui n’est ni tout à fait une pièce de théâtre, ni tout à fait une représentation de danse mais le mariage des corps et des voix qui évoluent autour d’une problématique commune : celle de notre jeunesse en 2020. La pluridisciplinarité de Pigment.s est un élément central du spectacle : avant le process d’écriture, les sujets de la pièce avaient déjà été réfléchis et arrêtés entre Adeline Bernardo, la chorégraphe, Niccolò Romero-Passerin, le compositeur, et moi-même. Nous voulions parler de l’égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi et surtout entre les êtres humains. La question du genre nous taraude depuis longtemps et nous avions le désir d’ouvrir le champ des possibles et de proposer l’idée d’une société où chacun serait considéré indépendamment de son sexe. Nous voulions parler du malaise qui habite une majeure partie de notre génération face aux modèles qui nous sont proposés, qu’il s’agisse des modèles de corps filiformes ou parfaitement musclés, et qui sont ancrés dans l’imaginaire collectif. Nous voulions aborder la question des droits homosexuels, qui aujourd’hui encore peinent à être reconnus et acceptés partout dans le monde. Nous voulions dénoncer la domination patriarcale dans laquelle nous évoluons, car malgré les mouvements humanistes qui se battent pour l’égalité des droits entre hommes et femmes, le pouvoir est essentiellement attribué au masculin. Nous voulions déconstruire. « Moi j’arrive pas à me retrouver dans ces schémas qui ont été décidés pour moi j’ai l’impression de ne pas rentrer dans les cases je n’arrive pas à nous trouver à mon corps et à moi une place dans ce monde et j’ai envie de me révolter avec la terre entière pour défendre que si on peut sortir des schémas traditionnels et créer notre propre place dans un monde qu’on choisirait sans stéréotypes de genre » Les artistes passent du mot au geste et du geste au mot pour exprimer une idée ou une opinion sur les sujets qui sont abordés tout au long du spectacle. Un peu comme un édifice qui se bâtit brique à brique, Pigment.s se construit à travers l’expression de chacun : tous se confrontent au même problème, ils ne trouvent pas leur place au sein de la société d’aujourd’hui. Chaque parole est une expérience individuelle qui s ’inscrit dans un collectif d’idées, et les costumes y font écho : chaque t ouche de couleur qui s ’ajoute au costume de base, noir, vient marquer le témoignage d’un vécu semblable au propos porté au plateau. C’est ainsi que nous avons rassemblés trois musiciens (un pianiste, une violoncelliste et Niccolò qui est aussi harpiste), cinq danseurs et trois comédiens au plateau, dans l’idée que tous seraient amenés à traverser plusieurs disciplines, à l’image de notre travail de création : j’écrivais, Niccolò composait sur mes brouillons, j’envoyais à Adeline, elle nous répondait avec des propositions de mouvements, nous échangions nos impressions et nous recommencions. La musique, la danse et le texte appartiennent à un seul et même projet, et ne sont pas divisibles. Sans l’un, Pigment.s n’existe pas. Nous avons entamé le travail de répétition dans le même sens : à travers le texte, la musique et le mouvement. Nous cherchions avec les corps comme j’ai cherché avec les mots, en menant la quête autour de la collectivité en opposition à l’individu (au sens individuel, singulier) : comment chacun tente de trouver et de faire sa place dans ce monde au milieu des autres. Si le texte offre une vision plutôt claire d’un propos ou d’une idée, la danse et la musique viennent prendre le relais quand les mots ne suffisent plus, ou ont trop dit, et racontent avec le corps, le mouvement, à la place du texte. Pigment.s, c’est aussi une histoire de relations : les témoignages de ce groupe de jeunes, leurs rêves, leurs combats, leurs espoirs et leurs désillusions mais aussi l’amour qui les lie les uns aux autres. J’ai choisi de travailler sans coulisses, avec les artistes en permanence sur la scène exposés au regard du spectateur. Je n’avais pas envie d’entrer dans la forme scénographique de la coulisse où l’artiste quitte la scène pour aller boire après une chorégraphie ou se changer entre deux répliques. Dans le propos porté au plateau, où nous tentons de mettre à nu les questionnements, les doutes et les peurs de notre génération, dissimuler des actions du quotidien n’avait pas de sens, au contraire. Le danseur qui va boire ou le comédien qui se change participent eux aussi au déroulement de l’action, tout autant que celui qui prend la parole. La sueur et la fatigue des corps, la matière des tissus informes qui prennent vie et deviennent costumes quand on les enfile, que tout soit là, sans artifice. Dans un désir de rendre accessible la scène de théâtre en laissant la possibilité aux gestes ordinaires du quotidien d’arriver, c’est un moyen d’impliquer le spectateur en lui disant « Comédien, danseur, musicien, peut-être, mais avant tout être humain qui comme toi a soif après avoir dansé ou parlé. » Tout comme l’abolition du Quatrième Mur, un changement de costume face public a la même signification qu’une adresse directe, droit dans les yeux. Nous sommes ensemble, tous ensembles le temps de vous raconter cette histoire.
Mathilde Flament-Mouflard, août 2020
NOTE D'INTENTION CHORÉGRAPHIQUE
Dans cette création où le corps est au coeur de la problématique, la danse n’arrive pourtant pas tout de suite. Il était important que les mots viennent d’abord planter le décor, et que l’équipe au complet soit au plateau dès l'ouverture. Toute la force du prologue réside dans cette montée en puissance. Les corps sont d’abord des individualités, chacun est à sa place, éloigné d’un autre, mais au fur et à mesure, les artistes ressentent le besoin de se déplacer, se connecter et se rassembler pour former le premier « choeur » au centre de la scène. Des cris silencieux s’échappent de la masse, pendant que des corps se meuvent au ralenti comme en apesanteur. De manière générale, le mouvement dansé que je propose est habité. Je l’aborde de façon animal, viscéral, respiré et spiralé, en flux et reflux continus. Des éclats percutants, des essences vraies, des mouvements bruts, évocateurs de sensations et d’émotions sincères. Nous utilisons beaucoup la respiration. Elle permet de nous ancrer dans le sol. Quand les corps s ’essoufflent, et que la musique n’est plus, j’aime laisser le public entendre les inspirations et expirations accélérées des corps qui ont travaillés. Le contact entre tous les protagonistes est le fruit d’un travail de recherches en improvisations guidées et d’expérimentations. Comédiens, danseurs qu’importe, parfois le corps a besoin de prolonger les phrases, et dans cette pièce ça en devient parfois presque vital. J’aime travailler en laissant de la liberté, c’est de mon point de vue primordial pour incarner un mouvement ou une parole juste qui vient directement de l’âme de l’interprète. Ce principe de liberté s’applique aussi au rapport danse-musique. Le mouvement ne doit pas toujours suivre la lenteur ou la rapidité d’un tempo, il doit apprendre à s’en défaire. La première chorégraphie "Asteria" de l ’Acte I, propose des mouvements rapides qui soutiennent le tempo musical, mais quand arrive la fin du morceau, les corps ralentissent tandis que le tempo pressé se poursuit encore. Cette danse assumée garde en réalité toute la force, l’affirmation du texte qui précède. Pour clôturer l’Acte I, vient ensuite, "Wolf Pack". Cette chorégraphie est le point d’orgue du spectacle, le rythme est incessant, aucune pause visuelle n’intervient. La scène est envahie de courses, de traversées de cour à jardin, de jardin à cour. Il était important de jouer aussi sur les différents niveaux de hauteur, avec des portés, des grands sauts, des déplacements à ras le sol. Cette partie dansée se devait d’intégrer tous les artistes, pour donner cette impression d’électrons libres envahissant l’espace scénique. La metteure en scène et moi voulions pousser les corps jusqu’à leur épuisement total, pour cela "Wolf Pack" se termine par une transe dansée menant à un effondrement des corps au sol. Le premier passage dansé de l’Acte II arrive avec "Alba in Laputa". Le texte, la gestuelle du quotidien, le mouvement dansé prennent place. Afin de conserver la justesse, la sincérité de cet instant, j’ai proposé aux artistes de traverser ce passage par l’improvisation guidée. Guidée, car la trame est bien écrite, chacun sait ce qu’il a à faire et à quel moment précis, sans pour autant être emprisonné dans la mémoire du geste. Ainsi, au fur et à mesure des représentations nous ne perdrons pas la sincérité de ce passage plein de tendresse et de poésie. "Ishtar" est la dernière chorégraphie de la pièce. C’est une danse de l’espoir, de la renaissance. Les mouvements sont fluides, aériens, spiralés et respirés et il n’y a aucun arrêt. Les mouvements gagnent en envergure, prennent de l’ampleur, du petit mouvement au grand mouvement et vice versa, les corps donnent l’impression d’être des poumons en action.
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